(LETTRE OUVERTE) Violences sexuelles : au-delà de la politique
Lundi dernier, l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) lançait officiellement sa politique de prévention des violences à caractère sexuel dans le cadre de la Loi visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel dans les établissements d’enseignement supérieur qui demande à tous les établissements d’enseignement postsecondaire de se doter de mesures concrètes pour prévenir les violences sexuelles.
Cette loi prévoit entre autres l’obligation de formations pour toutes les personnes membres de la communauté universitaire. La politique de l’UQTR compte aussi sur la mobilisation de la communauté : les personnes témoins de toute forme de violence sexuelle sont appelées à les dénoncer.
Pour les établissements postsecondaires, reconnaitre l’importance du phénomène des violences sexuelles et prévoir des mesures d’action concrètes pour les contrer constitue tout un pas en avant.
L’adoption de cette loi, née après des années de lutte du milieu féministe, de prises de parole des femmes, de mobilisations sur les campus, des recherches scientifiques qui ont contribué à documenter le phénomène, donne espoir que les choses peuvent changer.
Cependant, la lutte est loin d’être gagnée.
Durant la présentation, l’intervenante du Service d’aide visant à prévenir et à combattre les violences à caractère sexuel a souligné le caractère sexiste des violences sexuelles. Si tous les hommes ne sont pas des agresseurs, il est vrai ; 96,8 % 1 des personnes qui commettent des agressions sont des hommes. Et la majorité des victimes sont des
femmes. Et toutes les femmes ne sont pas égales devant ces violences : les femmes lesbiennes, les femmes handicapées, les femmes racisées sont surreprésentées dans ces données 2 . Une illustration concrète – et très malheureuse – du rapport de pouvoir à l’œuvre dans ces violences.
Nous sommes d’avis qu’il est impossible d’ignorer le caractère sexiste de ces violences et le contexte d’inégalités dans lesquelles celles-ci s’inscrivent si l’on souhaite voir de réels changements s’opérer.
Le poids des gestes et des mots
Au-delà de l’élaboration de procédures et de l’offre de services, c’est tout un changement de culture qui doit s’opérer. Nous devons, collectivement, prendre conscience du rôle que jouent les gestes quotidiens et les « blagues » dans la
perpétuation de cette culture sexiste et inégalitaire. Le consentement et le respect doivent faire partie intégrante de toutes les interactions. Ce changement de culture implique de se questionner, de revoir nos pratiques, d’éduquer, de sensibiliser et de dénoncer. Il s’agit d’une responsabilité collective que nous devons toutes et tous porter.
La politique adoptée par l’UQTR et la loi provinciale constituent un cadre, essentiel pour lutter contre les violences sexuelles certes, mais ne peuvent constituer une fin en soi. C’est ensemble que nous détenons le plus grand pouvoir de changement.
Ensemble, agissons !
Ont cosigné cette lettre :
Carol-Ann Rouillard, doctorante en communication sociale, membre du Groupe d’actions femmes
Marie-Guiguet Doron, étudiante au baccalauréat en loisir, culture et tourisme, membre du Groupe d’actions femmes
Carol-Ann Hobbs, étudiante à la maitrise en enseignement, membre du Groupe d’actions femmes
Véronique Durocher, chargée de cours et étudiante à la maitrise en communication sociale, membre du Groupe d’actions femmes
Marilyne Boisvert, chargée de cours et doctorante en éducation
Simon Fitzbay, étudiant à la maitrise en communication sociale
Annick Leblanc, commis aux affaires modulaires
Olivier Malo, vice-recteur aux ressources humaines
Valérie Larose, conseillère en développement durable et en ressources humaines
Caroline Prud’homme, directrice des services aux étudiants
Carole Mallette, infirmière clinicienne
Catherine Lemarier-Saulnier, chargée de cours
Lyne Douville, professeure au département de psychoéducation
Nathalie Bouchard, membre du comité de prévention des violences à caractère sexuel
Kathleen Bélanger, directrice du Service de la formation continue et de la formation hors campus
Joëlle Boucher-Dandurand, coordonnatrice du Centre d’aide et de lutte aux agressions à caractère sexuel (CALACS) de Trois-Rivières
Association générale des étudiant(e)s de l’UQTR
Bénédicte Taillefait pour le service d’aide visant à prévenir et à combattre les violences sexuelles à l’UQTR et intervenante au CALACS de Trois-Rivières
Vicky Girard, étudiante à la maitrise en communication sociale
Clémence Bideaux, étudiante à la maitrise en lettres, Groupe d’actions femmes
Joëlle-Claude Dupuis, étudiante au baccalauréat en études françaises