On change les règles pour la santé des femmes (et de la planète)

La première fois que Mélissa Goulet Gayadeen a découvert les protections hygiéniques lavables, et qu’on lui a dit qu’elle y trouverait un produit durable et confortable, elle pensait que ce serait trop beau pour être vrai! Pourtant, elle célébrait sa première année à la tête d’Atelier Zone verte, une entreprise qui conçoit et fabrique des protections hygiéniques lavables, le 13 octobre dernier. Bien plus que pour la vente, Mélissa se donne un important rôle de sensibilisation.

Les serviettes hygiéniques qu’elle avait achetées à l’époque étaient fabriquées en Chine. « Ce n’était pas de la confection haut de gamme ou éthique, mais je ne trouvais pas d’alternative sur le marché », explique Mélissa. Elle s’est donc mise à la couture avant de finalement se pencher à l’amélioration du produit.

Depuis l’achat de l’entreprise Atelier Zone verte, elle a amené son patron de confection encore plus loin en changeant à quatre reprises ses modèles. « Je suis assez contente, parce qu’au départ, je fabriquais les serviettes comme l’ancienne propriétaire, mais j’avais parfois des problèmes de fuite ou autres. Je me suis informée sur le marché, j’ai changé ma manière de coudre, j’ai essayé différents tissus et j’ai investi dans l’entreprise. Le produit s’est vraiment amélioré! Même que je n’arrive plus à lui trouver de défauts! », se réjouit-elle. Mélissa est à l’écoute de ses clientes, et c’est comme ça qu’elle peut désormais offrir un produit qui répond à ses besoins. Elle offre d’ailleurs une quinzaine de modèles de serviettes hygiéniques différents en plus de son nouveau produit, la culotte menstruelle.

Elle vise la qualité pour que ses produits durent de 5 à 10 ans et aient un réel impact écologique par la diminution des déchets. « C’est économique aussi, on ne se le cachera pas. Quand tu n’achètes rien pendant 10 ans, ça paraît dans ton budget. Sur 10 ans, ça me revient à 5 cents l’utilisation, alors que si tu achètes du jetage, ça revient à environ 30 cents l’utilisation. Après deux ans, tu as rentabilisé ton kit », révèle Mélissa.

En plus des aspects écologiques et économiques, l’entrepreneure assure que les protections menstruelles lavables sont également un produit sain pour la femme, car avec les serviettes hygiéniques jetables et les tampons, on ne sait pas avec quoi notre corps est en contact. « On n’a aucune idée de ce qu’il y a là-dedans! Si tu achètes des céréales, tu connais les ingrédients. Si tu achètes un t-shirt, tu sais en quoi il est fait. Mais pas les tampons, lance-t-elle. Je trouve ça quand même un peu alarmant qu’on achète des choses en ne sachant pas réellement ce qu’on consomme. Des recherches récentes aux États-Unis prouvent que ces produits peuvent contenir du plomb, de l’arsenic et des pesticides. Toutes sortes de produits que tu ne veux pas mettre à cet endroit-là. »

Exploiter ses forces d’entrepreneure

Mélissa Goulet Gayadeen a une clientèle déjà bien fidèle à l’entreprise Atelier Zone verte, ce qui est tout de même un exploit lorsque l’on vend des produits qui perdurent dans le temps. La clé de son succès : la proximité que les clientes développent avec la créatrice! Grâce à ce lien privilégié, elle a accès à une mine d’or d’informations pour créer le meilleur produit possible pour les femmes.

Tout d’abord, ses réseaux sociaux débordent de vidéos qui se veulent à la fois informatives et humoristiques, même parfois un peu éclatées, sur une foule d’angles et enjeux qui touchent les menstruations et les protections hygiéniques : des anecdotes personnelles, des montages vidéo de danse et de musique, des instructions d’entretien où des mythes sont brisés, etc. Elle y fait également des vidéos en direct pour des « partys » qui contiennent notamment des présentations de produits, de nouveaux tissus, des promotions, des concours. C’est aussi l’occasion d’échanger avec la confectionneuse qui répondra à toutes les questions des clientes. « C’est important de ne pas invalider les femmes qui vivent ces choses-là, mais de prendre quand même ça avec légèreté », croit-elle. Depuis qu’elle a commencé à partager ses vidéos, ses ventes ont explosé et elle a doublé le nombre d’abonnés à son infolettre.

« Je suis le genre de personne qui crée facilement des liens, et quand je veux que quelque chose fonctionne, je vais mettre beaucoup d’énergie! »

Elle propose aussi des produits thématiques et saisonniers. Présentement, elle offre une belle gamme de tissus pour Halloween! Tout est dans les détails : elle propose un programme de points et de référencement, une serviette d’essai à faible coût (5$) aux nouvelles clientes et, bientôt, un quiz interactif pour aider à choisir sa serviette parfaite.

Elle s’adapte aussi aux physionomies et besoins avec des longueurs variées et plusieurs niveaux d’absorption, allant du protège-dessous aux serviettes post-partum. « Et si la cliente ne trouve pas ce qui lui convient, on va trouver une solution! », assure-t-elle. Il existe aussi des modèles pour adolescentes et des modèles tanga.

Mélissa travaille toujours sur de nouveaux produits. Le 13 octobre dernier, elle a également lancé sa première culotte menstruelle inclusive, allant de XXS à 5XL. « J’adapte mes produits en fonction de ce que les femmes me disent et ce qu’elles ont le goût d’avoir! » Les idées ne manquent pas, d’ailleurs. Elle travaille sur des culottes d’entrainement pour jeunes enfants et un modèle de culottes pour adolescentes. Elle devrait aussi ajouter sous peu d’autres produits zéro déchet, comme du papier de toilette lavable, des couvre-plats pour remplacer la pellicule plastique, des lingettes démaquillantes. Déjà, elle a commencé à déléguer la production de ses sacs de transport imperméables. « Éventuellement, je sais qu’il va falloir que j’engage », confirme l’entrepreneure.

Ce ne sont pas les idées ni les ambitions qui manquent. Elle songe notamment à mettre sur pied un programme social dans les écoles afin d’aider les adolescentes en situation de précarité menstruelles à s’équiper en protections hygiéniques lavables. « Je viens du milieu communautaire. Pour moi, c’est super important que la communauté bénéficie aussi de mes produits », révèle Mélissa.

Réduire ses déchets en tant que femme

Du 21 au 27 octobre se tiendra la Semaine québécoise de réduction des déchets. Mélissa Goulet Gayadeen profitera de l’occasion pour tourner des capsules vidéo axées davantage sur l’aspect environnemental des protections hygiéniques lavables.

« Mon objectif est de sensibiliser les jeunes et moins jeunes à ces enjeux sans adopter un discours alarmiste ou moralisateur, mais plutôt en favorisant une discussion ouverte et éducative sur l’impact de leurs choix en matière de protection menstruelle », assure-t-elle.

« En termes de déchets, ça a vraiment un impact sur la planète et sur les sites d’enfouissement », insiste Mélissa. Elle ajoute qu’en 40 ans, soit environ la période fertile de la femme, elle consommera 15 000 protections jetables, versus 300 protections lavables pour la même période.