Fidèle au poste 365 jours par année
C’est sous le son du cadran à 4h tous les matins que Carmen Desjardins se réveille, se prépare et prend la route de son café-restaurant, 7 jours sur 7, depuis plus de 50 ans où elle vous attend et vous sert, toujours avec le même sourire, malgré le fait qu’elle soufflera ses 80 bougies en 2025.
Carmen Desjardins est plus que restauratrice. Dans le secteur Cap-de-la-Madeleine, c’est une pure légende. Pour certains, c’est une sœur, une amie proche, une confidente.
« Je suis native de Rimouski et j’ai commencé avec un petit comptoir-lunch. J’ai décidé d’ouvrir un plus grand restaurant ensuite. Je suis partie avec deux petites valises en train à Montréal. Mon restaurant fonctionnait très bien et j’y suis restée 18 ans. Lorsque mon mari a eu un accident, on a emménagé à Trois-Rivières. J’ai ouvert le restaurant Chez Carmen pendant 18 ans, et ensuite le Café Rétro pendant encore 18 ans. Mon plus récent, c’est Au Vieux Café, depuis 10 ans », raconte-t-elle.
« C’est moi qui cuisine et c’est de la cuisine maison. J’ai une gentille personne qui m’aide, tandis que mon fils, Jean-Denis Poulin, s’occupe de plusieurs commissions. Il est toujours présent pour sa mère. Le matin, je commence mes déjeuners et, ensuite, je prépare mes menus du jour. J’enchaîne avec mes repas cuisinés, la soupe et mes desserts. J’ai toujours été habitée par la passion du restaurant et j’ai toujours dit: »En restauration, tu l’as ou tu ne l’as pas! » J’adore servir mes clients. Ils me suivent depuis plus de 30 ans, alors c’est comme une famille pour moi. Ils ont un petit problème? Ils viennent voir Carmen! », lance-t-elle en riant.
Carmen n’a jamais ralenti. Son café est ouvert 365 jours par année depuis fort longtemps. Tout récemment, elle a dû s’absenter pendant deux jours pour visiter de la famille à Rimouski.
« Si je ferme les jours fériés, les clients n’auront pas de place pour aller manger, ajoute-t-elle, tout sourire. Même à Noël et au Jour de l’An, par exemple, c’est tellement important pour moi d’être ici pour nourrir les gens seuls qui n’ont pas de place où aller ou pas de famille avec qui célébrer. C’est le temps le plus précieux pour moi. Je prépare la cuisine des Fêtes comme s’ils étaient à la maison, donc avec des pâtés à la viande, du ragoût de boulettes, de la dinde et un beau dessert. Les gens repartent et ils sont heureux. »
Carmen Desjardins est bien consciente de cette chance qu’elle a d’être toujours en forme.
« Je suis ici à 4h30 et j’ouvre à 6h30. Il y a eu la COVID-19, mais j’ai continué à cuisiner pour mes clients. Ils venaient chercher leurs plats à l’entrée. Jamais je n’ai pensé fermer parce qu’ils avaient besoin de manger. Lorsque les restaurants ont rouvert, là c’était la joie. Ils étaient contents de me revoir, mais moi aussi j’étais contente parce que ce contact-là avec les gens m’avait manqué. C’est une famille et on s’entraide. Parfois, je demande à un client d’aller me chercher une poche de patates et il accepte en courant. »
Pour Carmen, l’idée de fermer l’endroit pour profiter d’une retraite bien méritée est encore loin.
« Si j’arrête, je meurs! s’exclame-t-elle. Blague à part, je ne peux pas arrêter parce que je vais tomber malade. Je suis la plus vite pour cuisiner! Je suis la meilleure! Si on arrête de travailler, c’est là qu’on va ankyloser et tomber malade. Lorsqu’une personne de 65 ans arrête de travailler, les maladies surviennent. C’est une leçon que les personnes âgées devraient suivre, de rester actives avec un emploi à temps partiel. C’est ça le secret de la santé. J’en ai pour au moins trois ans encore ici, si la santé le permet. Mon père est mort à 100 ans, en pleine santé, d’un bête accident », ajoute-t-elle.
« Lorsque j’ai vendu le Café Rétro, je me suis retrouvée une semaine à la maison et je pensais devenir folle. Je me suis présentée ici et je voulais louer le local, mais le monsieur ne voulait pas louer. Je lui ai demandé de s’informer, autour, qui était Carmen Desjardins et le lendemain, il me rappelait pour me le louer. Je suis heureuse d’aider le monde. J’aime le contact avec les gens », conclut-elle.