Des lunettes 3D pour découvrir différemment des œuvres
La Galerie Berthelet de Trois-Rivières présente en primeur une exposition des plus récentes œuvres de grand format de l’artiste-peintre Jean-Philippe Fortin.
« J’arrivais de la Côte-Nord, un endroit que j’affectionne énormément et où je me libère totalement l’esprit. Quand Caroline St-Pierre m’a appelé pour me proposer de faire une exposition à la Galerie Berthelet. J’avais en tête de nommer l’exposition Entre fleuve Saint-Laurent et la forêt boréale. Dès lors, je me suis mis à examiner énormément les couleurs de la Côte-Nord, raconte Jean-Philippe Fortin. Les aurores boréales sont magnifiques, tout comme les fleurs que l’on croise sur le bord de la route qui sont d’un mauve qu’on ne vois pas ailleurs. La couleur des couchers de soleil n’y est pas pareille non plus. J’ai essayé de refléter ces couleurs et ces teintes particulières à la Côte-Nord dans l’exposition. »
Dans ses œuvres texturées et immersives de grand format, Fortin explore la relation entre la nature et le climat, tout en offrant une réflexion sur la préservation des écosystèmes québécois à travers l’intensité des couleurs et la profondeur de ses créations.
L’artiste se spécialise dans la projection, une technique qui consiste à projeter de la peinture à distance sur la toile ou tout autre support.
« La projection, c’est aussi une science, car si je veux que ma peinture reste fidèle à la couleurs et que le rouge que je lance sur le jaune demeure rouge, il fallait que je comprenne la science derrière l’art, explique Jean-Philippe Fortin. J’aime dire que je suis devenu un coloriste de fou parce que c’est de la chimie. Il faut notamment ajouter du poids dans la peinture. «
Pendant deux ou trois ans, son atelier a été un laboratoire dans lequel il essayait de comprendre la chimie de la peinture et les façons de réaliser une projection précise sans que ça devienne un désastre et que le tout soit esthétiquement beau.
« Je suis rendu dans cet endroit où, artistiquement, ma projection évolue beaucoup, ajoute-t-il. Par exemple, le dripping inventé par Pollock, j’essaie de le pousser au maximum actuellement. Je ne sais pas ce que ça donnera dans les prochaines années, comment ça va évoluer. Paul-Émile Borduas m’a aussi influencé par sa technique, ses couleurs épaisses et la géométrie dans ses œuvres. »
Quand le 3D s’en mêle
L’exposition a ceci de particulier qu’il est aussi possible d’apprécier la quinzaine d’œuvres à travers le filtre de lunettes 3D. L’œuvre prend alors vie d’une façon complètement différente: les rouges ressortent de la toile, les bleus s’enfoncent, de nouvelles textures insoupçonnées émergent. L’effet varie si l’on est plus loin de l’œuvre, plus proche, plus en angle.
« Ces lunettes là sont des joueurs de tour parce que ça nous amène à voir des couleurs qui vont refléter ou qui vont sortir du tableau. C’est le mélange entre les différentes couleurs qui fait qu’on a l’impression d’entrer dans le tableau. Ces lunettes nous amènent à un autre niveau. J’appelle ça de l’art vivant », note Jean-Philippe Fortin.
C’est une jeune artiste de Québec, Mégane Fortin, qui lui avait apporté des lunettes 3D lorsqu’il avait acheté une de ses œuvres. « À un moment, j’ai regardé mes tableaux avec ces lunettes et je suis tombé à la renverse! J’ai compris qu’il y avait quelque chose qui se passait. La première chose que j’ai faite a été d’aller à Montréal pour voir des Riopelle avec les lunettes. Wow! J’ai compris qu’il y avait un système d’épaisseur, qu’il faut mettre plusieurs couches. J’aime dire qu’on rentre dans ma tête avec ces lunettes. »
D’ailleurs, pour mieux comprendre les différents effets induits par l’utilisation des lunettes 3D, l’artiste a réalisé de nombreux tests en portant lesdites lunettes.
« Pour moi, c’est important que l’art laisse une empreinte, une émotion. J’aime voir les gens prendre une pause et passer du temps devant un tableau et les voir ressentir quelque chose. C’est mon plus grand plaisir. Je comprends qu’il s’est passé quelque chose entre la personne et le tableau. »
Les œuvres de Jean-Philippe Fortin sont exposées à la Galerie Berthelet (rue des Forges) jusqu’au 1er décembre.
Par après, il travaillera sur un projet de grande ampleur en lien avec l’héritage des glaciers du Nord Canadien.
« Ce sera une grande série de tableaux. C’est un grand projet par rapport à mettre l’empreinte de certains glaciers sur des tableaux. Tout le processus de création sera documenté. C’est une série qui, je l’espère, sera éducative et laissera une empreinte. Je suis très près de la nature et de l’environnement. Ceux qui me connaissent vont comprendre rapidement où je m’en vais avec ça », conclut Jean-Philippe Fortin.