Carrefour 40-55: une conseillère propose un référendum consultatif
La conseillère municipale Pascale Albernhe-Lahaie proposera mardi, au conseil municipal, une résolution formelle visant à tenir un référendum consultatif sur l’avenir du parc industriel 40-55 en milieux humides.
« J’invite le maire Jean Lamarche à repousser le vote sur le Carrefour 40-55 pour consulter l’ensemble de la population que nous représentons, déclare la conseillère du district des Rivières. C’est une question de principes, d’honnêteté et de respect pour les gens de notre ville. Je l’invite aussi à entendre les inquiétudes des biologistes, des économistes et de nos spécialistes de l’UQTR qui veulent nous aider à bâtir une ville meilleure et plus forte. Il faut les écouter. L’heure est à consulter plutôt qu’imposer, à rassembler plutôt que diviser. »
Mme Albernhe-Lahaie dénonce notamment le fait que le projet ait fait l’avis d’un avis de motion quelques heures à peine après que la troisième mouture du projet d’agrandissement ait été présentée aux élus municipaux. Elle déplore que les élus comme la population n’aient pas eu suffisamment de temps pour examiner cette mouture et de considérer les différentes visions.
« La problématique pour moi, ce n’est pas le parc industriel en soi, mais plutôt la manière de le faire, la façon dont on livre le projet et comment on travaille avec les gens actuellement. Je ne sens pas de main tendue aux citoyens ni aux experts. Ça me pose un réel problème. »
Elle souhaite aussi lancer un message d’espoir aux citoyens de Trois-Rivières. « On assiste peut-être au point culminant de cette tension au sein du conseil. J’invite mes collègues à faire front commun pour améliorer les pratiques de gouvernance à la Ville. L’acceptabilité sociale et la participation citoyenne doivent être une réelle priorité à Trois-Rivières », insiste Pascale Albernhe-Lahaie.
Une vidéo tournée en plein coeur des milieux humides
La conseillère municipale se rendra d’ailleurs en plein coeur des milieux humides du secteur visé par l’agrandissement du parc industriel Carrefour 40-55 en compagnie de la biologiste Audrey-Anne Loiselle afin d’effectuer une visite exploratoire filmée.
« Initialement, je m’étais rendue dans les milieux humides près des industries, mais pas dans les marais. C’est vraiment intéressant et ça permettra de savoir plus précisément ce sur quoi on s’apprête à voter », explique Mme Albernhe-Lahaie.
« L’objectif est de faire découvrir les lieux et voir exactement ce que c’est et d’avoir le regard d’une biologiste sur les lieux. C’est une vidéo qui se veut pédagogique et je crois que ça viendra donner un ton et un regard différent », ajoute-t-elle.
La vidéo sera ensuite diffusée à partir de sa page Facebook de conseillère municipale avant le vote de mardi soir, espère-t-elle.
Des voix continuent de s’élever contre le projet
De nouvelles voix se sont fait entendre, dans les derniers jours, pour s’opposer à l’agrandissement du parc industriel, dont celles du directeur et de membres de l’Institut de recherche sur les PME de l’Université du Québec à Trois-Rivières.
Dans une lettre envoyée aux conseillers municipaux et au maire de Trois-Rivières, Étienne St-Jean, François Labelle et Cécile Fonrouge demandent au conseil municipal de voter contre le projet tel que présenté et « d’écouter les nombreux experts en aménagement territorial, sur les milieux humides, en développement durable et en développement économique qui soulèvent les drapeaux rouges actuellement. »
« Les multiples questions restées en suspens nous laissent croire qu’il serait sage d’appliquer le Principe de précaution qui devrait guider nos choix en matière environnementale lorsque l’ensemble des informations et des impacts ne sont pas identifiés », affirment les chercheurs.
Le dossier a également fait surface durant le FestiVoix de Trois-Rivières, alors que le groupe Vulgaires Machins s’est spécifiquement opposé au projet de développement lors de leur prestation.
Le groupe Mères au front de la Mauricie a aussi lancé une pétition en ligne demandant au conseil de « suspendre le vote concernant le projet d’agrandissement du parc technologique 40-55″ et de »respecter les engagements de la Politique environnementale de la Ville de Trois-Rivières et l’Engagement de Montréal pour la diversité COP15 et protéger les milieux humides restants sur le territoire de la ville de Trois-Rivières ». Lundi midi, 4898 personnes avaient signé la pétition.
La grogne contre le projet se transportera aussi devant l’hôtel de ville, mardi à 18h, tandis qu’une manifestation se déroulera sur le parvis.
Mesures de sécurité renforcées
En réponse au tumulte ayant eu lieu lors de la séance publique du 20 juin dernier, la Ville de Trois-Rivières a mis en place des mesures de sécurité additionnelle « afin d’assurer le bon déroulement des séances du conseil » en prévision de la séance du 4 juillet, qui coïncidera avec la tenue du vote concernant le projet d’agrandissement du Carrefour 40-55.
Les citoyens devront passer dans un portique de sécurité détecteur de métaux à l’entrée. Les sacs et bagages seront inspectés par les agents de sécurité. D’ailleurs, un troisième agent de sécurité sera présent sur les lieux. L’un d’entre eux sera équipé d’un bâton détecteur de métaux. Par ailleurs, un cordon de sécurité a été installé entre les élus et le public.
La Ligue des droits et libertés (LDL) saute aussi dans la mêlée et rappelle « aux autorités municipales et policières leurs obligations de respecter les citoyen-ne-s qui s’opposent à ce projet et qui exercent notamment leur droit de manifester et leur liberté d’expression ».
« Lors de la séance du conseil municipal du 20 juin dernier, des citoyen-ne-s ont brandi une bannière et chanté le slogan »pas un hectare de plus! » pour manifester leur opposition au projet, appuyés par plusieurs élu-e-s. La réaction du maire suppléant Daniel Cournoyer a été de suspendre la séance et d’appeler la police pour que celle-ci intervienne. Le reste de la séance s’est déroulée en présence de la police, les portes verrouillées empêchant toute personne d’entrer ou de sortir de la salle. L’ampleur de cette réaction laisse peu d’espace pour les contestations, qui sont pourtant essentielles dans un contexte de débat démocratique », commente la LDL.
La Ligue des droits et libertés souligne aussi que « l’intervention de la police et le verrouillage des portes du conseil municipal le 20 juin dernier contribuent à attiser les tensions, alors que les citoyen-ne-s exigent simplement que le projet de carrefour industriel fasse l’objet d’un débat éclairé, démocratique et transparent ».
La Ligue entend aussi demeurer à l’affût du déroulement de la séance du conseil municipal du 4 juillet. « On s’attend à ce que les élu-e-s et les autorités policières respectent les droits et libertés de tous les citoyen-ne-s, ainsi que les processus démocratiques et la participation du public à la prise de décisions, rien de moins », conclut Laurence Guénette, porte-parole de la Ligue des droits et libertés.